Les Deux Taureaux et une Grenouille
Deux Taureaux combattaient à qui posséderait
Une Génisse avec l'empire.
Une Grenouille en soupirait.
"Qu'avez-vous ?"se mit à lui dire
Quelqu'un du peuple croassant.
Et ne voyez-vous pas, dit-elle,
Que la fin de cette querelle
Sera l'exil de l'un ; que l'autre, le chassant,
Le fera renoncer aux campagnes fleuries ?
Il ne régnera plus sur l'herbe des prairies,
Viendra dans nos marais régner sur les roseaux,
Et nous foulant aux pieds jusques au fond des eaux,
Tantôt l'une, et puis l'autre, il faudra qu'on pâtisse
Du combat qu'a causé Madame la Génisse.
Cette crainte était de bon sens.
L'un des Taureaux en leur demeure
S'alla cacher à leurs dépens :
Il en écrasait vingt par heure.
Hélas! on voit que de tout temps
Les petits ont pâti des sottises des grands.
Two bulls and the frog
Two bulls began a fight to see which would possess
A heifer-and the empire, too.
A frog made noises of distress.
"But what have they to do with you?"
Inquired the croaker's croaking friend.
Replied the first, "But, can't you guess?
It's all too clear how this will end:
The loser trotting off to exile from the fields,
The victor chasing after him until he yields
All claims of being king upon the grassy plain.
And then when he comes here among our reeds to reign,
We will be trampled in the muck before he's done!
This war that lust for Madam Heifer has begun
Will end by crushing all our nation, one by one."
His apprehension was correct-
The losing bull ran off to cower
Down in the swamp, with the effect
Of squashing twenty frogs per hour.
Alas! All ages demonstrate
That small folk are destroyed by passions of the great.